Mon collègue du rayon Beaux-Arts (donc Musique) a beau la défendre en disant qu'elle correspond à la ligne graphique de la collection, il faut être de mauvaise foi ou avoir un sens de l'esthétique assez foireux pour dire quoi que ce soit de positif sur cette couverture hideuse. Non, honnêtement, elle est pas à gerber? Des vaches? Quoi? Des vaches? Pour un livre ayant pour sujet le hard rock des années 80. L'auteur vivait dans la campagne américaine? Et alors? C'est tout ce que vous avez pu trouver pour illustrer le bouquin. Des vaches?
Vous vous retrouvez donc à ajouter, pour éviter toute confusion, un sous-titre (était-il déjà là dans la version originale?) bien explicite contenant le terme "heavy metal". Terme qui, déjà, est sujet à débat. Oui, les américains l'utilisent pour des groupes mous du genou comme Bon Jovi. Il n'est question, pour une majeure partie en tout cas, que de ces groupes américano-américains. Bon le débat sur les étiquettes est plutôt dérisoire. Mais pour ma part, j'ai plutôt tendance à considérer Mötley Crüe, Kiss ou Guns N' Roses comme du hard rock. On lit bien Helloween sur la quatrième. Un mec qui parle de Helloween (de W.A.S.P. aussi) dans son bouquin mérite ma pleine attention. Sauf que c'est trompeur, Helloween est à peine cité (certainement moins que dans ces trois dernières lignes). Et apparemment W.A.S.P., c'était pas son truc, à Chuck. Ni Iron Maiden, considéré comme "trop sérieux" et "ennuyeux".
Il nous prévient, c'est un bouquin très subjectif et pas que musical, sous-entendu, plus ou moins sociétal. Mais je ne dégrirai pas son objectif, il a tout à fait raison de dire que si l'on a pas vécu cette vague de glam rock ou hair metal, comme vous voulez, on ne peut pas vraiment réaliser son impact sur les ados, surtout américains. Son idôlatrie concernant Mötley Crüe peut me paraître bien ridicule, mais son adolescence a été marquée par ce groupe et Poison ou Cinderella comme la mienne l'a été par Maiden ou Judas Priest. Sauf que pour mon cas, c'était pas du tout pour être "cool". Voilà l'une des principales raisons pour laquelle je ne me reconnaîs pas vraiment dans ses lignes (et, en toute logique, ça ne pouvait pas être le cas, pour plusieurs raisons).
On a beau avoir eu quelques groupes en commun, dont le plus flagrant est Guns N' Roses, ce critique musical, qui doit avoir une certaine notoritété outre-Atlantique, s'arrête uniquement sur les groupes qui ont marqué les "masses" (les seuls qui puissent être cités avec dédain par les non hardos/metalleux, puisqu'ils ignorent tout des autres) et la plupart des fans déclarés. Nirvana, Marylin Manson ou Korn (américano-américains donc). Ceux dont on a vu les T-Shirts fleurir et se remplacer les uns les autres sur des périodes de quatre ou cinq ans. Adolescent je détestais tous ces groupes des années 90 parce qu'ils étaient les seuls à être médiatisés et/ou considérés comme des groupes pour ados rebelles, les seuls qui méritaient l'attention. Cependant, je les écoute depuis quelques années sans pour autant regretter de ne pas l'avoir fait plutôt. Si le livre avait écrit plus loin dans les années 2000 (il a été commencé en 1998 et publié en 2001 là-bas), Chuck aurait parlé des phénomènes System Of A Down ou Nickelback. Non que ce soit critiquable, j'aime bien ça aussi, mais bon, il n'y a pas qu'eux dans toute la constellation Hard Rock/Metal.
Dans le ton, Chuck me fait penser à notre Frédo national (le "dandy" qui se met à faire des films pour vendre ses anciens romans parce qu'il n'a plus assez d'imagination pour en écrire de nouveaux). Une ironie ostentatoire qui joue avec l'image qu'on a de lui. Un semblant d'auto-dérision plutôt irritant. Certaines réflexions m'ont plutôt laissés perplexe. Comme la différence, essentielle selon lui, qui sépare hardos et metalleux. Tenez-vous bien, les uns boivent de l'alcool, les autres sont plutôt tentés par la drogue. Une liste débile des fantasmes sexuels des hardos femelles selon le groupe qu'elles écoutent. Enfin des trucs plutôt chiants à lire.
Mais, mais, mais, pour ceux qui pensent que cette chronique est purement négative, je vais les prendre à contre-pied. Parce que voyez-vous, ce livre a beaucoup contre lui, mais certaines lignes sont de véritables pépites d'analyse musicale et elles valent le coup d'être lues, du moins pour ceux qui s'intéressent aux groupes concernés. La dichotomie au sein de Kiss entre Gene Simmons et Paul Stanley, une comparaison étonnante entre Axl Rose et Kurt Cobain, quelques fines réflexions sur Black Sabbath et Ozzy Osbourne, Van Halen ou Queensrÿche. Entre autres. Ce sont ces choses qui m'ont accroché malgré les absurdités creuses qui parsèment l'ouvrage. Elles sauvent tout. Exceptée la couverture.
Si vous n'avez que ça à faire vous pouvez relire tout ça sur Rana Toad: http://ranatoad.blogspot.com/2012/02/confessions-dun-fan-de-heavy-metal-en.html
Fargo Rock City - Confessions d'un fan de heavy metal en zone rurale, Chuck Klosterman, Payot & Rivages, coll. "Rivages Rouges". Traduit de l'américain par Stan Cuesta.
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